Haïkus printaniers
Mes haïkus (presque) hebdomadaires… Comme d’habitude, tous les textes sont Tous droits réservés © Julie Turconi (utilisation ou reproduction interdite sans l’autorisation de l’autrice). Merci!
ciel de pluie
je m’enfonce à chaque pas
dans la neige molle
Ça y est, l’hiver se retire doucement, en pointillés, en traînant un peu les pieds. On entre dans cet entre-deux, saison à part entière, oscillation du Temps qui berce nos incertitudes du lendemain. Les oiseaux migrateurs reviennent les uns après les autres et leurs cris emplissent le ciel et les bords de rivières. Ils ne sont pas les seuls à chanter l’amour et le désir, la nature s’éveille et se prépare au renouveau, à la montée de la sève dans les troncs et dans les cœurs, à la caresse du vent.
sol détrempé
la marmotte tapisse son nid
de feuilles mortes
feuilles froissées
les écureuils font leur nid
dans l’épinette
Je souris en voyant ces écureuils transporter des brassées de feuilles mortes dans ma belle épinette bleue. Puis je pense aux implications moins amusantes de leur installation, juste à côté de mon potager… Je vais avoir de la concurrence pour les légumes, cet été! Espérons que mon vieux matou joue son rôle de prédateur. Mais quand je vois sa réaction face à une simple araignée, j’ai un doute.
sursaut du chat
sur le sol une araignée
détale
Je pense que l’Autre [mon conjoint, ndlr] est bien plus efficace quand il s’avance en criant et en gesticulant vers nos petits rongeurs à longues queues touffues, hôtes indésirables du jardin, pour les faire fuir…
Il n’est d’ailleurs pas le seul à faire du bruit.
vélo rouillé
le retour des corneilles
sonne le glas de l’hiver
Ah, l’état de mon pauvre vélo après un hiver de déplacements sur les pistes (heureusement) salées! J’ai beau l’entretenir, il rouille et il blanchit… Un peu comme moi, finalement : certains de mes cheveux prennent une teinte de blond douteusement claire et, au réveil, mes articulations ne sont plus aussi souples qu’autrefois!
Heureusement, mon brave coursier ne grince pas encore comme les corneilles, dont le retour chez nous marque la fin inéluctable de la saison froide. Une mort annoncée par ces criaillements gutturaux qui font écho aux grincements de ma corde à linge et aux cris des mouettes ravies de retrouver les lacs créés par la fonte de la neige, au parc voisin.
les cris des mouettes
se mêlent à ceux des enfants
premier crocus
ciel de printemps
une sortie de sécheuse
boucane des nuages
bruits de pluie
dans les gouttières en dégel
un grand ciel bleu
Ne crions cependant pas victoire trop tôt, les gants, tuques et autres bottes sont toujours d’actualité!
caprice d’enfant
dans les allées du parc
l’hiver s’attarde
Parce que l’hiver s’accroche toujours un peu. Il nous rappelle de lâcher prise et de maîtriser notre impatience malgré notre hâte de fouler de nouveau la terre, de voir des fleurs, des feuilles et des couleurs.
fin d’hiver
les sapins se détachent
dans le couchant
Inutile de se presser ou de chercher à accélérer le passage du temps. La roue tourne, inexorable. Et le Temps a tout son temps.