Haïkus de rentrée
Mes haïkus du quotidien. Comme d’habitude, tous les textes sont Tous droits réservés © Julie Turconi (utilisation ou reproduction interdite sans l’autorisation de l’autrice). Merci!
L’été bat doucement en retraite face à l’arrivée imminente de l’automne. Les nuits rafraîchissent, les cadavres de cigales jonchent les trottoirs, les oies se rassemblent bruyamment, les sandales laissent place aux chaussures fermées. Tout change, inéluctablement, comme chaque année. Mois après mois, la vie avance et l’hiver se rapproche. Des envies de coucounage se pointent le nez, les feuilles changent de couleur, la pluie arrose et nourrit nos rêves.
brume matinale
le silence des cigales
accueille l’automne
premiers vols d’oies
dans un ciel zébré de rose
fraîcheur du soir
ondée d’automne
à vélo dans les rues
je souris au vent
Ce vent qui bruisse dans les frondaisons et fait chanter les arbres en chœur. Ce vent qui me pousse vers l’avant, au diapason du temps qui égrène ses jours sans jamais se lasser. J’aimerais parfois qu’il ralentisse, car mes saisons passent, elles aussi, et je ne peux que les suivre.
murmures du vent
dans les branches de l’érable
la ville s’éveille
un reste d’été
sur les fleurs presque fanées
un papillon bleu
matin frileux
un vieux couple emmitouflé
marche prudemment
Ils marchent côte-à-côte, en se tenant la main. Peut-être simplement pour ne pas tomber. Ou ne pas se perdre dans les méandres du temps et de la vieillesse. Rester ensemble jusqu’au bout, n’est-ce pas une des beautés de la vie à deux? Ça, et la lenteur.
le vert de l’étang
des gouttes s’accrochent
sur les feuilles
lumière rasante
entre les branches un diamant
arachnéen
Je contemple la vie qui se prépare au repli temporaire de l’hiver à venir. Les écureuils enfouissent résolument leurs provisions dans mes plates-bandes. Les insectes ralentissent leur vol. Les monarques quittent le pays, à la poursuite de l’été qui s’enfuit.
bruissement d’ailes
encore un repas
à l’ombre du pommier
Chaque jour qui passe se remplit d’automne. Les écureuils s’attaquent maintenant au pommier, en arrache les fruits, n’en prennent que quelques bouchées avant de s’apercevoir qu’ils ne sont pas à leur goût. Je rage. Le vieux matou, lui, dort paisiblement sur sa chaise.
une odeur de pommes
envahit la maison
prémices d’automne
bruits de tondeuse
sur le sol poussiéreux
un silence de mort
Les bruits du quotidien se raréfient. Les tondeuses sont en voie de disparition et ce n’est pas dommage. Le soleil descend de plus en plus vite, comme s’il était pressé de passer à autre chose. De se reposer un peu, peut-être.
Il y a moins de monde dehors. Les enfants sont repartis sur les bancs de l’école. Même les adultes vont accomplir leur devoir.
vote anticipé
les files s’allongent
sur les trottoirs
Il ne reste plus qu’à finir les récoltes avant de rentrer.
jour férié
la cueillette des raisins
bat son plein
Un goût sucré dans la bouche, la langue mauve, le croquant des pépins entre les dents… Les guêpes et les perce-oreilles me disputent les raisins, s’accrochent aux grains. Je les remets tous gentiment dehors, l’un après l’autre. Pour eux aussi, le temps passe et leur hiver est probablement plus proche que le mien.
Dehors, suspendue hors de tout instant, immobile sur sa toile, une tisserande déroule le fil du temps.
soleil couchant
sur ses fils de lumière
une araignée guette
Il est l’heure de nourrir le chat et de rentrer le linge.